Les 18 et 19 décembre dernier, les éditions Kana et leurs partenaires ont organisé un salon virtuel le Pop Asia Matsuri Festival (abrégé en PAM), avec un riche programme d'émissions et de vidéos d'interventions de différents mangaka.

 

Avec la crise sanitaire et le recours au streaming de plus en plus courant, ce n'est pas le premier événement en ligne proposé par un éditeur. En 2020, Crunchyroll avait fait son show et cette année, Glénat et Kurokawa ont aussi leurs festivals mais cantonné à un programme d'émissions sur Twitch pour la partie accessible sur internet. Il y a aussi des conventions qui ont tenté la formule 100% virtuelle mais la seule que j'ai à peu près suivi était le Japaniort Festival en septembre de l'année dernière. 

Je me suis connecté au PAM dès samedi matin mais j'ai suivi ensuite le programme par intermittence, restant rarement plus d'une demi d'heure d'affilé sur un un sujet. Initialement, je pensais faire un petit thread rapide sur Twitter par rapport à ce qui m'a irrité pendant le festival mais le format micro blogging est trop réducteur et mon irritation provient surtout du contraste entre la tonne d'efforts déployés et la richesse du contenu, "ruinés" par certains aspects. L'objectif n'est surtout pas de cracher sur cet événement offert gracieusement par Kana mais d'émettre parfois des critiques que j'espère constructives. 

Soyons honnêtes, ce fut une des motivations pour me reconnecter à certains moments pour voir les résultats. J'ai trouvé très bien le nombre d'exemplaires originaux mis en jeu. Il y avait au minimum 5 gagnants et même 20 pour Inio Asano. Certes, il fallait acheter un ouvrage de l'auteur mais c'est une règle courante des éditeurs pour ce genre de concours et les fans qui avaient déjà tous les tomes sortis pouvaient être amenés à en offrir à quelqu'un d'autres. En ce qui me concerne, cela m'a motivé à prendre des oeuvres d'auteurs que j'aime bien mais sans plus. À titre d'illustration, j'avais juste Solannin donc j'en ai profité pour prendre un autre titre d'Asano.

 

 

Il fallait aussi s'y prendre à l'avance et faire l'achat avant le week-end et ne pas s'y intéressé le jour même. Cela montrait une certaine motivation et la règle qu'un seul manga d'un auteur donne autant de chance qu'en acheter plusieurs a du permettre d'éviter quelques soucis d'intendance sur la boutique en ligne et limiter les pulsions de certains. Je me souviens qu'au Salon du Livre de 2013, il y avait une chance de tirer un dessin à chaque tome acheté de Takehiko Inoue, l'auteur de Vagabond et Slam Dunk. De mémoire, un ami avait claqué ainsi 150€ alors que les mangas coûtaient un peu moins chers à l'époque mais d'un autre côté, il a eu raison car il a finalement eu son dessin original.  

Je poursuis avec ce qui m'a fâché dès ma première connexion. Sans surprise, il y a un temps de chargement pour pénétrer dans l'enceinte virtuelle mais cela recommence dès que vous changiez de pièces. Pour ma part, il fallait compter au minium 20 à 30 secondes d'attente à chaque passage. À cela s'ajoute qu'un seul appel au menu pour chercher une autre information faisait perdre la 3D et exigeait de tout recharger à nouveau. Quand je pense qu'on nous bassine qu'une page web ne doit pas se charger en plus de 3 secondes au risque de perdre votre visiteur, je comprends bien que peu de monde ait eu la patience de naviguer à droite et à gauche et que beaucoup ait fini par abandonner.

 

 

J'ai compris qu'il y avait bien un jeu de piste avec des cartes à trouver pour obtenir des fonds d'écran et motiver les gens à se balader mais je n'en trouvée aucune en ayant parcouru les trois quarts des stands - j'ai sans doute très mal cherché mais quand même.  

 

 

Mon portable multimédia a 3 ans mais il s'est mis à peiner en entrant dans le salon avec ses 8Go de RAM. Je me demande ce que cela a pu donner avec un smartphone, qui représente maintenant la majorité des visites via internet. J'ai juste lu ci et là des témoignages de personnes qui n'ont pas pu pénétrer car l'espace 3D ne se chargeait pas du tout.

 

 

Je n'aime pas non plus "marcher" pour accéder à un stand alors que le côté virtuel devrait permettre d'y accéder directement. Passer par le menu stipule de non seulement faire une recherche mais de perdre puis recharger la 3D. Le summum a été de découvrir un stand en regardant de dos et de ne pas l'avoir vu en faisant le trajet de face. C'est réaliste mais cela devrait justement être l'avantage du virtuel d'éviter les mauvais emplacements.

 

Je n'ai rien contre la 3D en ce qui concerne la visite des stands pour visualiser les différents contenus, images ou vidéo...quand les liens veulent bien marcher. Samedi, par exemple, j'ai tenté en vain de lancer la vidéo sur le stand Fruits Basket - cela a fonctionné dimanche - et je suis tombé sur un écran d'erreur tel que celui-ci. 

 

Dans le salon 3D, la première chose que je cherchais, c'était où allait se dérouler les interventions des auteurs japonais. J'ai vu le stand PAM TV mais qui étaient réservés aux émissions. Je n'ai pas vu cette information dans le Hall principal donc j'ai essayé de chercher via le liste ou les thèmes de stands mais je n'ai rien vu non plus - il fallait comprendre que c'était via PAM'Art que je pensais être une galerie d'images. Quand j'ai cliqué sur le plan, je m'attendais à un espace interactif mais surprise, c'est un téléchargement du plan du festival au format PDF.

 

J'ai fini par découvrir qu'il était possible d'accéder aux interviews et live drawing via le menu, et en plus sans se prendre les temps de chargement 3D, je me suis cantonné à me connecter aux diffusions des auteurs par ce biais pendant tout l'événement.

 

 

Quand j'ai lu sur Twitter que la navigation était intuitive, j'ai ris (très) jaune. J'ai vu passer un visiteur égaré sur le chat de Youtube demander où se passait l'interview d'Inio Asano. Un journaliste et fan se désolait du manque de spectateurs pour regarder le streaming avec des auteurs japonais mais encore fallait pouvoir trouver ce stream... si on était au courant. J'ai aussi interrogé sans succès la liste des stands avec le mot replay. 

 

Autre détail, la signalétique indiquait qu'il y avait une salle labyrinthe d'images mais il y a avait en fait des expositions complètes dedans. À l'entrée de la salle, vous aviez une exposition Inio Asano mais il fallait comprendre qu'une autre exposition Kamimura vous attendait à la sortie du labyrinthe si vous l'empruntiez. Je ne l'ai compris qu'après le festival. Je suppose qu'il a fallu un peu de temps pour préparer la salle virtuelle et cela est dommage de se priver ainsi des visiteurs, déjà qu'il ne devait pas être nombreux à arriver jusque là.

 

 

L'accès au salon 3D exigeait une inscription (gratuite) pour pouvoir entrer dedans. Ayant participé au concours de shikishi, j'avais du ouvrir un compte donc cela ne m'a pas gêné plus que ça. Je pensais en revanche que c'était optionnel et un biais de prioriser les visiteurs en cas de forte affluence. Je comprends cependant que plusieurs soient aller directement suivre les émissions via Twitch. J'ai bifurquer sur Youtube pour éviter de me prendre les publicités de jeux vidéo à chaque reconnexion et pour pouvoir visionner en différé. Le chat y était moins animé et les questions lues uniquement sur Twitch. Samedi, les gens s'en plaignaient sur Youtube mais dimanche, il y avait au moins une personne de Kana qui les invitait à basculer sur Twitch.

De l'interaction, il y en avait mais mon ressenti est que cela était limité à Twitch, un peu dans le chat Youtube...et les réseaux sociaux. Le salon 3D n'incitait pas à entreprendre la moindre conversation avec d'autres visiteurs voir même vos amis. Cliquer sur un avatar renvoyait vers la liste de tous les utilisateurs, avec en plus un pseudo forcé à partir de vos nom et prénom. Pendant le confinement, j'ai expérimenté un autre système 3D pour un salon professionnel qui a opté pour la carte virtuelle aussi. Certes, c'était plus du genre design fil de fer mais fluide et interactif - pour ceux qui voulaient échanger. Nous sommes loin ici de l'omnicanal. Japaniort avait juste un canal Twitch et un pauvre Discord en guise de salon, avec un dossier pour chaque stands qui échangeaient avec les visiteurs. Le salon dans Discord, c'est ultra basique mais j'ai trouvé ça plus convivial que cette version 3D.  

Naviguer sur l'historique du stream Youtube m'a permis de visionner les reportages faits et présentés par David Zavaglia. Vous appréciez différemment le style de présentation et de commentaires de David mais je m'y suis habitué entre ses reportages pour J-One à l'époque et ses streamings personnels plus récents. Autant, le thème Jump Festa était attendu avec peu de valeur ajoutée le dimanche - où il avait glané les mêmes informations sur internet que tout le monde -, autant j'ai bien aimé ses autres reportages notamment sur les illuminations qui sont puissance 10 en Japon par rapport à ce que je vois en France.

Je mentionne la lecture de l'historique de vidéo Youtube car je n'ai jamais réussi, en cours de journée, à tomber sur l'émission que je voulais. Il est compréhensible que le programme débute ou prenne du retard mais quand cela prend 30 à 45 min, il devient difficile de s'y retrouver, surtout que le retard est parfois comblé par la suite. Cela m'a le plus surpris sur le canal PAM'Art où l'essentiel des vidéos me semblaient enregistrées à l'avance.  Le résultat était des écrans plutôt hétéroclites avec des titres sans rapport avec le contenu.

 

Les formats étaient inégaux, entre la master de class Momo Fuji et l'interview écrite d'Io Sakisaka lue en français à l'orale, mais la plupart se sont livrés à l'exercice de live drawing que ce soit sur papier pour les uns ou en directement en numérique pour les autres. Hiroyuki Asada, le mangaka de Letter Bee, a bien montré son côté méticuleux. À au moins deux reprises, il donne l'impression d'avoir fini de dessiner son shikishi et hop, nous le revoyons rajouter un détail. Le mode à distance s'y prête mais le plateau d'auteurs réuni par Kana est exceptionnel, c'est du jamais vu de mémoire - sauf en pensant à Japan Expo en faisant la somme de tous les mangakas en comptant ceux qui viennent en catimini. Je suis étonné qu'il n'ait fallu "que" 6 mois de préparation, d'après ce qui a été mentionné dans l'émission bilan du week-end.

 

Le festival est évidemment une partie intégrante du plan de communication de l'éditeur mais ils ont fait un peu concentré d'annonces. Outre les nouvelles plublications à horizon plus ou moins lointaines - Tokyo Higoro de Taiyô Matsumoto en 2023 -, je retiens qu'ils rejoignent l'offre forfaitaire de manga.io en janvier et qu'ils font tout leur possible pour faire venir en France Masashi Kishimoto, l'auteur de Naruto pour les 20 ans de la série animée.  

 

Là aussi, c'était disparate, suivant les sujets, les animateurs et les intervenants, mais j'ai suivi avec plaisir ce que j'ai pu voir. Il y a juste l'épilogue Noël ADN que j'ai laissé tomber rapidement - d'autres personnes ont aimé ? - mais j'ai plutôt été plutôt agréablement surpris par le reste. Les thèmes étaient intéressants et sortaient un peu des sentiers battus. Je n'ai pas suivi la hype autour de la nouvelle bande dessinée Goldorak mais je suis tombé sur la séquence émotion suite au message enregistré par Go Nagai. J'étais presque étonné que les auteurs n'ait pas eu un retour du mangaka avant. Il faudrait les prévenir qu'il reste encore un niveau au-dessus quand j'ai vu Leiji Matsumuto passer au stand de Jérôme Alquier à Japan Expo pour se faire dédicacer sa BD d'Albator.