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Quand Couleur de Peau : Miel n'était encore qu'un work in progress

Par le :: Manifestations

films , mangas , 2012 , animes

Le long métrage Couleur de peau : miel a fait sensation au festival d'Annecy en remportant le prix du public, et il est sorti également dans les salles de cinéma en France et en Belgique, respectivement les 6 et 13 juin 2012. Le film est la transposition partielle de la bande dessinée autobiographique de Jung, qui est né en Corée et qui a été adopté en Belgique à l'âge de 6 ans.

A la fin avril 2012, pendant le cycle Planète Manga, une séance était consacrée au film, catégorisé work in progress. Le long métrage était techniquement terminé mais l'exclusivité était réservée aux festivals, dont Annecy, ce qui fait que la session était sous la forme d'une conférence où le réalisateur, Laurent Boileau, nous présentait la genèse du film, assorti d'extraits et de divers matériaux stockés sur son ordinateur portable.

Encore aujourd'hui, je n'ai ni vu le film ni lu la bande dessinée mais l'actualité autour du film, m'a donné envie de revenir sur cette présentation, que j'avais trouvée intéressante et qui m'a quant même marqué, bien que j'y sois allé en mode touriste, plutôt qu'en auditeur studieux qui prenait des notes.  Il est dommage que vous ne puissiez pas voir (encore ?) en ligne la vidéo de la conférence, contrairement à d'autres rencontres également filmées par les équipes techniques du Centre Pompidou.

Pendant plus d'une heure et demie Laurent Boileau nous a parlé de son film, en présence dune partie de l'équipe et de plusieurs sponsors du projet. En revanche, Jung le protagoniste central n'était pas présent.  A cela, Laurent Boileau nous expliquait qu'ils se partageaient les interventions et d'autre part, que Jung n'était pas le type même de la personne extravertie.

Le projet d'adaptation a commencé quasiment juste après que Laurent Boileau ait été touché par la lecture de la bande dessinée Couleur de peau : miel.  La démarche entamée a été de rentrer en relation avec l'auteur et d'amorcer des entretiens avec lui, avec d'un côté un réalisateur qui juge un sujet intéressant à traiter et de l'autre, une personne que l'oeuvre adaptée va toucher au plus profond.

Il était frappant de voir la distance posée par Laurent Boileau vis-à-vis de Jung pendant la conférence, facilitée par l'absence de celui-ci. Le réalisateur nous dressait presque le portrait d'un personnage de fiction, en notant un côté atypique à exploiter : Bien qu'âgé maintenant d'une quarantaine d'année, Jung n'était jamais retourné en Corée, tout en mentionnant son envie d'y retourner un jour dans la postface de sa bande dessinée. L'auteur avait pourtant visité d'autres pays d'Asie, du Japon à la Thaïlande, en passant par la Malaisie. Ce voyage en Corée a été complètement intégré au projet et en a même été un moteur, avec le tournage du retour de Jung au pays.

Si le récit original a servi de base de discussion, la conception du film a puisé aussi sa source directement auprès du dessinateur, car il s'appuyait sur un nouveau scénario composé par Laurent Boileau. Une source qui n'a pas forcément faciliter la tâche, car certains sujets étaient visiblement tabous, et d'autres étaient jugés prioritaires au début de la conception, puis finalement oubliés. Il y a eu aussi à atténuer certaines visions personnelles de Jung, notamment le portrait de sa mère adoptive, qu'il retranscrivait durement dans ses dessins, alors que Laurent Boileau portait un autre regard sur elle.

Avec la règle de base de capter le Jung adulte en prise de vue réelle, et d'animer le Jung enfant en dessin animé, le film a pris le chemin d'un support hybride. Sa seule référence en tête étant Qui veut la peau Roger Rabbit et voulant être sûr d'obtenir un résultat plus probant, Laurent Boileau est passé par un studio d'animation pour effectuer un essai. Pour alléger l'effort, il n'avait droit qu'à un seul personnage, qui  ne devait pas parler. Cet essai a donné le premier trailer, déjà  flanqué d'un titre international: Approved for adoption.

Le résultat a été probant techniquement et a reçu un bon accueil des internautes. Pour l'anecdote, Laurent Boileau a même été approché par un distributeur près à diffuser le film, qui pensait qu'il était déjà terminé et qu'il s'agissait d'une véritable bande annonce.

Je ne me souviens pas que Laurent Boileau se soit éterniser sur la difficulté de financier le film, mais un bon nombre de régions françaises y ont contribué et la salle comportait beaucoup de représentants, intéressés de voir de plus près les ébauches.

Le support hybride est en fait plus diversifié que la simple distinction entre animation et les prises de vue réelles. Déjà, dans l'animation, il faut distinguer la 3D, utilisée pour narrer des épisodes réels de l'enfance, de l'animation 2D, qui illustre plus les délires et certains rêves. Par ailleurs, l'équipe a obtenu de la famille des films originaux, filmés en super 8, dont un extrait de l'arrivée le jour même de Jung enfant. Le dessinateur en ignorait l'existence.

Par ailleurs, Laurent Boileau a fait des recherches documentaires sur le phénomène général de l'adoption, notamment des enfants issues de la Corée. Techniquement, cela s'est traduit par l'insertion d'images d'archives cette fois-ci.

A ce sujet, Laurent Boileau a mentionné la part importante des orphelins coréens dans le circuit international de l'adoption, même plus récemment. Dans les années 50, la guerre de Corée a fait logiquement augmenter le nombre d'enfants abandonnés, avec en parallèle des mouvements caritatifs américains qui se sont organisés pour prendre soin d'eux. Cependant, les effets directs de la guerre ont été valables un temps mais ils n'expliquent pas les afflux suivants, qui prennent a priori racine dans la structure sociétale. Par exemple, pour exister civilement en Corée, un enfant doit être a priori reconnu par un homme, soit son père en temps normal, ou soit le grand père dans les cas plus difficile. Une mère célibataire, sans parents derrière, a donc quelques soucis pour élever son enfant, qui deviennent des candidats à l'adoption.

Jung est le fils d'un soldat américain et d'une mère coréenne, abandonné dans la rue, puis recueilli à l'âge de 5 ans dans un orphelinat, avant d'être adopté en 1971 par une famille belge, qui avait déjà 4 enfants. Le couple adopterait encore une enfant coréenne quelques temps après l'arrivée de Jung, autant d'épisodes de l'enfance du coréen relatés dans le récit.

Couleur de peau miel

Laurent Boileau s'est trouvé confronté à une difficulté attendues dans l'adaptation de la bande dessinée : Là, où les cases s'enchaînent, pas forcément au même rythme et où certains personnages sont gardé en dehors du champ, il a du choisir une construction plus séquentielle, avec l'obligation  d'enrichir des scènes pour conserver le même rythme, et éviter un sentiment de coupures.

Une partie de la rencontre a été consacrée à des aspects plus technique du film, avec entre autres, la maquette des personnages en 3D, avec l'évolution dans le temps du rendu pour aboutir à la version finale. L'équipe a enchaîné plus d'une centaine de personnages en tout, un même protagoniste comptant pour plusieurs, dès qu'il changeait de garde robe.

Il a été aussi question des décors et des bruitages, avec des questions inhabituelles pour un réalisateur de documentaires : Chaque spécialiste demandait des détails sur les matières imaginées pour quasiment chaque objet, pour parfaire le rendu au niveau visuel et sonore.

Si le retour de Jung en Corée a été scénarisé, avec des repérages préparatoires et un parcours étudié,  ses réactions étaient naturelles et inconnues avant le tournage, car il a joué le jeu en allant en Corée vraiment pour la première fois. En revanche, là où l'équipe s'attendait à plus d'émotion, il ne s'est pas passé grand chose et au montage, la partie filmée a visiblement pris moins de place que celle imaginée initialement.

Voir les extraits du film final ne m'a pas enthousiasmé, même si certains passages comiques remplissaient leur rôle. Je ne suis pas fan des dessins, mais je pense qu'il faut mieux voir le film comme un tout, et les critiques élogieuses me pousseront sans doute à regarder le long métrage un jour, à défaut de lire la bande dessinée.

 

Couleur de peau miel

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